25 janvier 2013
Les positions du gouvernement Charest ont énormément changé durant le conflit étudiant de 2012. Après avoir refusé de négocier parce que les consultations avaient déjà eu lieu1; refusé de nous rencontrer parce que Line Beauchamp ne voulait pas s'asseoir avec Gabriel Nadeau-Dubois2; puis parce que nous refusions de condamner la violence. Après tout cela, seulement, le gouvernement a fait mine de négocier. Retour sur le tango libéral du printemps dernier.
Avant l'ouverture des négociations, le gouvernement s'était déjà avancé, faisant quelques propositions qui visaient à dégonfler le mouvement de grève. Bien que le terme « offre » puisse être questionné, il n'en reste pas moins que le gouvernement a bel et bien tenté d'acheter la paix en annonçant des mesures très ciblées. C'est ainsi que le 5 avril, après un mois et demi de grève, le gouvernement annonce qu'il étendra le seuil minimal de contribution parentale de 35 000$ à 45 000$3. Des bonifications de prêts étaient aussi proposées pour les ménages ayant un revenu annuel entre 60 000$ et 100 000$. Finalement, l'annonce comprenait l'établissement d'un régime de Remboursement Proportionnel au Revenu (RPR) pour les étudiants et étudiantes endettées.
Une première ronde de négociations
Le gouvernement accepte de s'asseoir avec les grévistes pour la première fois le 9 avril, au lendemain d'un congrès de la Coalition Large de l'Association pour une Solidarité Syndicale Étudiante (CLASSE), qui a décidé d'affirmer qu'elle dénonçait la violence délibérée, sauf en cas de légitime défense. Jugeant que cette position « [soufflait] le chaud et le froid », le gouvernement décide d'ajouter une nouvelle exigence : les associations étudiantes nationales4 devront à présent conserver une « trêve dans le déploiement de gestes de perturbation sociale et économique »5. Même si la CLASSE déplore cette nouvelle exigence libérale, elle décide de participer aux négociations, déclarant qu'elle n'avait, de toute manière, aucune action prévue pour la durée de la trêve.
Deux jours de négociation se déroulent finalement derrières des portes closes avant que le gouvernement ne lance sa première véritable offre : la hausse sera maintenue, et aura exactement la même ampleur. Seulement, elle durera sept ans, plutôt que cinq6. Le refus des grévistes, clamé haut et fort dans les rues, sur les lignes de piquetage, mais surtout dans les assemblées générales de reconduction de grève, était alors bien prévisible.
Question d'ajouté l'insulte à l'injure, le gouvernement nous informe aussi, presque avec empressement, que la mesure s'établira à coût nul pour l'État, car elle sera financée à même les crédits d'impôts destinés aux étudiants et étudiantes. Notons aussi qu'avec cette offre prévoit le maintien des deux mesures précédemment annoncées, soit la bonification de l'Aide Financière aux Études et le RPR.
Seconde ronde de négociations
Le 4 mai 2012, deux semaines après l'échec des premières négociations, les grévistes sont de nouveau conviés à négocier. La rumeur électorale commence à planer, alors que la pression augmente sur les administrations des cégeps et des universités qui voient l’imbroglio de la reprise des cours empirer dramatiquement.
Au terme de deux nouvelles journées de négociations, le gouvernement annonce qu'une entente a été signée. Au début, les portes-paroles des grévistes triomphent : selon Gabriel Nadeau-Dubois, porte-parole de la CLASSE, cette entente est « la preuve que la grève a porté fruit »7. Mais à tête reposée, on réalise que l'entente se révèle être davantage en faveur du gouvernement; les négociateurs et négociatrices étudiantes ont signé une offre qu'ils et elles avaient mal comprise. L'offre comprend (en plus des offres précédentes, qui sont conservées) la création d'un « comité provisoire sur la gestion universitaire », lequel permettra aux étudiants et étudiantes qui y siégeront de proposer des coupes dans les frais afférents dans le but de réduire la facture étudiante. Le tout se fera à coût nul pour le gouvernement, qui pourra se contenter de rester assis en regardant les étudiants et étudiantes se débattre pour gérer les coupures dans leurs propres universités. On peut dire enfin que Jean Charest a, en plus de son humour parfois déplacé, un goût recherché pour l'ironie.
La composition de ce comité provisoire nous révèle la volonté du gouvernement de bien garder « les deux mains sur le volant ». En fait, en s'assurant, d'une part, que chaque dollar arraché sera puisé à même les coffres des universités, et, d'autre part, que les groupes en faveur de la hausse seront majoritaires au sein du comité, le gouvernement rend impossible toute perspective de gain pour les grévistes. De plus, le ministère de l'éducation se confère un droit de veto sur toutes les coupes décidées par le comité, qui ne pourront pas, de toute manière, excéder le montant annuel de la hausse.
Tout au long du conflit, chaque offre aura été une injure pour des étudiants et étudiantes qui se levaient chaque matin pour piqueter, qui s'éreintaient à reconduire la grève, semaine après semaine. La mauvaise foi suintante du gouvernement, si elle fut dénoncée par plusieurs groupes, fut aussi saluée par certains et certaines comme une preuve d'ouverture. Mais cet absurde étalement de la hausse et ce comité provisoire consultatif sans issue, était-ce vraiment cela que l'on qualifiait d'ouverture de la part du gouvernement?
Pour la suite, Jean Charest aura fait l'Histoire : le 18 mai, le gouvernement adopte le projet de loi 78, une loi spéciale qui vise à forcer le retour en classe. Le premier août, il annonce qu'il déclenchera des élections dès le début du mois de septembre, faisant porter le poids de son opportunisme politique à une démocratie ébranlée. Difficile de croire que les offres faites aux grévistes pendant la grève visaient vraiment à régler le conflit. Difficile de croire alors qu'au contraire, elle ne visait pas à l'envenimer, pour mieux en récolter un éventuel profit politique.
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